Dans les turbines frelatées de la SAR (Société africaine de raffinage), se joue un polar politico-financier aux allures d’un deal à la Madoff. Derrière les contrats effectués à l’insu du Conseil d’administration estimés à plus de 200 milliards de FCFA, plusieurs zones d’ombre entourent la gestion catastrophique de l’entreprise.
Confidentiel Afrique a démêlé l’écheveau et révèle les contours insoupçonnés d’un deal qui va du véhicule d’investissement, au silence de la Directrice générale et de son ministre de tutelle en passant par l’appel de AFC et de la désinformation ourdie d’une poignée d’hommes d’affaires assidus visiteurs du palais présidentiel. EXCLUSIF
Une odeur nauséabonde dans les turbines de la Société africaine de Raffinage (SAR). Selon des investigations poussées de Confidentiel Afrique, l’affaire de la recapitalisation au forceps de l’entreprise cache des secrets insoupçonnés et se révèle être un deal à la Madoff. Selon des informations exclusives obtenues par Confidentiel Afrique, le modus operandi mis en avant par PETROSEN et les autres actionnaires, exceptée LOCAFRIQUE détentrice des 34% du capital, est assez surprenant. Alors que les lignes de financement sont disponibles et en cours d’exécution via un pool bancaire syndiqué (Groupe UBA, FBN, Banque islamique du Sénégal), PETROSEN et SAR font appel à AFC, un véhicule d’investissement et de financement qui entre en jeu.
Selon nos sources, sans en informer le groupement bancaire local engagé dans l’accompagnement de la SAR, depuis quelques années, AFC fait son entrée en jeu dans les turbines de l’entreprise. Pourquoi donc subitement cette collision ? LOCAFRIQUE prudente et prise de court a senti le piège vite pour contester cette option de faire appel de façon subtile à Africa Finance Corporation. D’après les informations de Confidentiel Afrique, c’est ce même AFC, amené par l’ancien ministre sénégalais de l’Énergie, Samuel SARR, qui a renoué avec ses activités d’homme d’affaires que l’on retrouve dans la levée de financement en partie du méga projet de centrale électrique West African Energy d’une puissance de 300 MGW.
Confidentiel Afrique révélait il y’a quelques mois que AFC avait pu mobiliser des investissements de l’ordre de 191 milliards, en syndication avec AFREXIMBANK pour 65 milliards FCFA et une autre ligne de 27 milliards FCFA pour l’Equity auprès des guichets de la méga banque panafricaine Coris Bank International de l’entrepreneur burkinabé Idrissa NASSA. Pourquoi PETROSEN et SAR ont contourné le pool bancaire classique pour faire entrer dans le jeu Africa Finance Corporation que l’on dit très connectée à l’ex-ministre Samuel SARR et co-promoteur de West African Energy.
Nos investigations font état de bateaux arrivés et d’autres bientôt en accostage sur les côtes sénégalaises. Alors que l’on se demande les raisons de cet empressement et de l’opportunité d’augmentation de capital, tenant compte surtout des besoins de financement immédiats qui sont de l’ordre de 60 milliards de FCFA.
Cache-t-on des cafards dans les placards ? Des sources autorisées renseignent que les contrats effectués à l’insu du Conseil d’administration et dans des circonstances opaques avoisinent les 200 milliards de FCFA. Quid des commissions ? Un initié du milieu nous glisse que ça peut aller jusqu’à 12 milliards au lieu de 8 Mds dans ce genre de transactions si l’on tient compte du périmètre et du volume du business.
L’omerta de la Directrice générale et du ministre de tutelle
Depuis l’éclatement de l’affaire qui a atterri devant la juridiction compétente, c’est silence radio du côté du ministère de tutelle. Idem chez la Directrice générale, nommée il y’a moins d’un an. Quelles sont les raisons de ce silence ? La grossièreté du deal et des zones d’ombre qui entourent ce dossier devront faire l’objet d’un communiqué officiel du ministère de tutelle pour informer l’opinion publique qui doit savoir ce qui se passe à la SAR, devenue au fil des années un véritable gouffre à milliards. Cette situation de délitement avait poussé l’ancien actionnaire majoritaire stratégique Saudi Bin Laden a déserté les turbines de l’entreprise. La non-participation de la firme pétrolière française très active dans ce secteur hautement stratégique dans l’activité de la Société africaine de raffinage en dit long, alors qu’elle est très bien impliquée dans la Société ivoirienne de raffinage (SIR). Grosse interrogation ?
Le Président Macky SALL abusé doit prendre le dossier en main
Devant la flopée de demande sociale, qui accélère la surchauffe socio-politique du pays (grève des enseignants, étudiants, des agents de santé, la pénurie d’eau et l’insécurité alimentaire qui guette certaines régions du pays), l’affaire nauséabonde de la SAR sur fond de gestion calamiteuse et prédatrice vient s’y greffer aux équations et met désormais le Chef de l’État Macky SALL dans une posture inconfortable.
Selon nos informations, le locataire du palais Roume a été briefé qu’hier tard dans l’après-midi sur les motivations de cette augmentation de capital de la SAR. ‘’ Le Président Macky SALL n’a pas été bien informé en amont sur la véracité des faits et la tournure des choses l’a surpris’’ a glissé une source officielle à Confidentiel Afrique. D’après notre source, le Chef de l’État est dans l’option de demander à la hiérarchie de la SAR de surseoir à l’option d’augmentation de capital jusqu’à nouvel ordre pour y voir clair.
À l’évidence, le contexte politique et social du moment peut plaider à ramener le calme et la sérénité à la Société africaine de raffinage, afin de ne pas dynamiter les turbines déjà frelatées.
Car, la Sar est entrée plus que jamais dans un état de métastase avancé avec des pertes abyssales de 59 milliards Fcfa pour l’exercice fin 2020 et des fonds propres négatifs de l’ordre de 53 milliards Fcfa, la même année.
Par Ismael AIDARA (Confidentiel Afrique)