Le tribunal de grande instance de Dakar a ordonné jeudi 14 décembre la réintégration sur les listes électorales de l’opposant sénégalais Ousmane Sonko. Alors que la justice avait décidé au départ de le rayer de la liste, ce retour en arrière du tribunal de Dakar pourrait relancer la candidature de l’opposant emprisonné à la présidentielle de février 2024.
Le tribunal de grande instance de Dakar a confirmé un jugement rendu en octobre qui avait été cassé par la Cour suprême mi-novembre. Cette décision remet dans la course l’opposant qui avait été radié des listes à la suite d’une condamnation à deux ans de prison en juin dans une affaire de mœurs.
Dans une courte décision lue devant les avocats, le juge a estimé que l’acte de notification de la radiation d’Ousmane Sonko des listes électorales n’avait pas été remis à la bonne personne. Une erreur d’application de la loi qui justifie aujourd’hui l’annulation de cette fameuse radiation du fichier électoral et rétablit l’opposant dans ses droits civiques, rapporte notre correspondante à Dakar, Léa-Lisa Westerhoff.
Ce détail très technique a une conséquence majeure : car pour pouvoir être élu, et être candidat à la présidentielle, il faut être inscrit sur les listes électorales. Ousmane Sonko a désormais jusqu’au 26 décembre pour déposer sa candidature et recueillir ses parrainages.
Pour les partisans d’Ousmane Sonko c’est donc une victoire majeure : c’est « la victoire du droit et de la démocratie au Sénégal », a jubilé l’un des avocats de la défense. Quelques supporteurs d’Ousmane Sonko rassemblés dans le tribunal ont accueilli cette nouvelle dans la liesse, scandant le nom de l’opposant.
Cette victoire presque inespérée survient à 12 jours de la fin du dépôt de candidature à la présidentielle. Car la Cour suprême avait cassé en novembre la décision de réintégrer Ousmane Sonko sur les listes électorales.
L’État annonce vouloir faire appel
Si la décision du tribunal de grande instance de Dakar remet le leader des Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef) dans la course à la présidentielle, la bataille juridique n’est pas encore gagnée. Dès la sortie de l’audience, les avocats de l’État sénégalais ont annoncé vouloir saisir la Cour suprême pour casser ce jugement : Ils ont 10 jours pour faire appel. « Ce n’est pas la peine de crier victoire et de jubiler trop tôt », a lancé Me El Hadj Diouf, avocat de l’État.
Reste désormais à savoir que se passera avant une nouvelle audience devant la Cour suprême : Ousmane Sonko va-t-il être autorisé à constituer son dossier pour être candidat ? L’administration lui avait refusé jusqu’à présent, estimant que le jugement n’était pas définitif.
Mais selon l’un de ses avocats, Me Ciré Clédor Ly, « ce recours n’est pas suspensif » de la décision du juge : « Le code électoral est très clair. Lorsque le juge rend sa décision, cette décision doit être immédiatement exécutée », a-t-il assuré. À voir si l’administration sénégalaise aura cette même lecture de cette décision.
Ousmane Sonko a été écroué fin juillet sous d’autres chefs d’inculpation, dont appel à l’insurrection, association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste et atteinte à la sûreté de l’État.
L’opposant dénonce cette affaire et d’autres dont il fait l’objet comme des machinations visant à l’écarter de la présidentielle. Le pouvoir se défend de son côté de toute instrumentalisation de la justice.
Rfi.fr