En graciant Karim WADE qui, après la confection de son passeport sur place, a quitté Reubeus au milieu de la nuit du 23 juin 2016, le leader de l’APR a envoyé un message que beaucoup ont refusé de décrypter. Mais, avec cette loi, qui peut assimiler un opposant à un potentiel poseur de bombe, votée le 25 juin, le coup de force de Me WADE du 23 juin 2011 passe pour une forfaiture mineure. Ainsi au Sénégal, contester la troisième candidature de Macky SALL pourrait bientôt être considéré comme déposer une bombe dans un marché.
La dernière fois que Macky SALL a assumé une décision, la terre a failli trembler sous les pieds des Sénégalais. « Le jour où j’en aurai la volonté ou le désir, je le ferais…». Depuis qu’il a lâché cette phrase, son ultime conviction, sur la détention de Khalifa SALL à qui il refusait une grâce présidentielle après l’avoir fait injustement condamné, le leader de l’APR fait très attention quant à ses intentions qu’il extériorise sans trop le vouloir. Très critiqué pour avoir dit ce qu’il pense, Macky a changé de tactique. Désormais, il dit ou fait les choses à moitié ou tout à fait le contraire de ce qu’il pense ou entreprend pour ne pas avoir en à assumer la responsabilité. Après sa tournée politique qu’il a qualifiée d’économique, Macky SALL, qui cherchait à devancer les inondations dans les localités qu’il a visitées, est maintenant sur le registre du terrorisme avec des motifs fallacieux.
« Le législateur sénégalais, à l’exception de quelques lois spéciales parcellaires, n’a pas encore véritablement défini un régime général avec des mesures spécifiques applicables à la lutte contre criminalité économique et financière tel que recommandé par certains instruments internationaux notamment, la Convention des Nations Unies contre les stupéfiants et les substances psychotropes, la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et la Convention des nations unies contre la corruption ». C’est cette longue phrase qui ouvre l’exposé des motifs du projet de loi n°10/2021 modifiant la loi n°65-60 du 21 juillet 1965 portant Code pénal et celle n°11/2021 modifiant la loi n°65-61 du 21 juillet 1965 portant Code de Procédure pénale.
Ainsi, le régime de Macky SALL, voulant vendre son projet liberticide, invoque les conventions internationales pour mieux faire passer la pilule du mécontentement. Pourtant, jusque-là, le leader de l’APR et ses partisans se sont montrés particulièrement hostiles à toute injonction venant d’institutions internationales. La dernière en date, celle de la cour de Justice de la CEDEAO qui décrédibilise sa réélection en brisant le système de parrainage qui a permis à Macky SALL de sélectionner les candidats qui lui ont face en 2019. Avant cela, cette même cour de Justice de la CEDEAO qualifiait la détention de Khalifa SALL d’arbitraire. L’on pourrait dire que Macky SALL n’accorde pas de crédit à la CEDEAO qui lui a pourtant permis de dégager Yahya Jammeh, mais se conforme à l’Organisation des Nations Unies (ONU). Mais, ce serait oublié que jeudi 7 novembre 2019, le Comité des Droits de l’Homme de cette même ONU a épinglé le Sénégal à propos de l’invalidation des candidatures de Karim WADE et de Khalifa SALL à la dernière présidentielle. Face à la presse du monde entier réunie à Genève, en Suisse, ledit Comité a mis à nu la violation, par le Sénégal, des textes ratifiés à l’international.
A chaque qu’une décision est tombée condamnant l’Etat du Sénégal, Macky SALL envoie ses experts en carton défendre l’indéfendable. « La première erreur de droit est l’interprétation de sa compétence à connaître de la loi sur le parrainage. La deuxième erreur de droit : la Cour se comporte, contrairement à son texte institutif et à sa jurisprudence, en Cour constitutionnelle juge de la légalité nationale. La troisième erreur de droit est que la Cour s’est prononcée en opportunité et non en droit ». C’est Ismaïla Madior FALL qui réagit ainsi à l’arrêt rendu par la Cour de justice de la CEDEAO qui donne un délai de six mois au Sénégal pour effacer le parrainage du processus électoral. «La Cour de Justice de la CEDEAO avait terminé son mandat, mais on ne sait pas par quel subterfuge elle s’est arrangée pour le proroger et statuer sur cette affaire ». A l’instar de l’ancien ministre de la Justice, Mansour FAYE, qui fait cette observation, met en exergue la souveraineté d’un Etat qui n’a rien à faire des conventions internationales.
Si Macky SALL et ses partisans avaient brandi les textes ratifiés à l’international pour arranger une petite affaire, beaucoup n’en trouveraient pas à redire. Seulement, le leader de l’APR a placé la barre très haute en parlant de terrorisme et de perpétuité. Ainsi, quand les sots et ignares parlaient de forces occultes pour qualifier les Sénégalais réclamant plus de justice dans la rue, c’était pour préparer cette sordide loi qui consacre Macky sa Majesté. Et avec le terrorisme qui a permis le massacre de beaucoup de résistants, le gouvernement n’a guère à se soucier de la communauté internationale qui pourrait même l’aider à traquer des terroristes qui ont des cartes d’électeur.
Pour mettre la main sur son pétrole, les USA ont présenté l’Irak comme un Etat terroriste en possession d’armes de destruction massive. Pour contenir sa population musulmane pour ne pas dire maghrébine de plus en plus croissante, la France a créé des « terroristes » qui ne survivent jamais à leur coup. Au Sénégal, contester la troisième candidature de Macky SALL pourrait bientôt être considéré comme déposer une bombe dans un marché. Décidé à gouverner contre la volonté populaire, le leader de l’APR met en place, petit à petit, son arsenal de guerre, tentant d’intimider ses détracteurs en attendant le grand reniement.
Mame Birame Wathie
Walfadjri