Vingt-six chefs d’Etat et de Gouvernement, dont Macky Sall, Angela Merkel, Emmanuel Macron, Paul Kagame, et le directeur de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus, ont co-signé, mardi 30 mars 2021, une tribune intitulée : « La Covid-19 met en évidence la nécessité d’un nouveau traité international sur la préparation et la riposte aux pandémies ». Dans cet éditorial publié sur le site officiel de l’OMS, ces personnalités ont indiqué qu’un engagement collectif permettrait « un partage des responsabilités » pour faire face à la crise sanitaire.
La pandémie de COVID-19 représente le plus grand défi auquel la communauté mondiale a été confrontée depuis les années 1940. À cette époque, les dirigeants politiques ont pris la mesure des ravages provoqués par les deux guerres mondiales et se sont réunis pour former le système multilatéral. Leurs objectifs étaient clairs : rassembler les pays, éloigner les tentations de l’isolationnisme et du nationalisme et faire face aux enjeux pour lesquels une solution commune n’était possible que dans un esprit de solidarité et de coopération, à savoir la paix, la prospérité, la santé et la sécurité.
Alors que nous luttons ensemble pour venir à bout de la pandémie de COVID-19, notre espoir est aujourd’hui le même de mettre en place une structure plus solide pour le secteur de la santé internationale afin de protéger les prochaines générations. Il y aura d’autres pandémies et d’autres situations d’urgence sanitaire de grande ampleur. Aucun gouvernement ni aucun organisme multilatéral ne peut, seul, faire face à cette menace. La question n’est pas de savoir si cela aura lieu, mais quand. Ensemble, nous devons être mieux à même de prévoir les pandémies, de les prévenir, de les détecter, de les évaluer et d’y réagir efficacement et d’une manière parfaitement coordonnée. La pandémie de COVID-19 nous a rappelé brutalement et dans la douleur que nul n’est en sécurité tant que tout le monde n’est pas en sécurité.
Nous nous engageons donc à garantir un accès universel et équitable à des vaccins, à des médicaments et à des produits de diagnostic sûrs, efficaces et abordables pour cette pandémie et celles qui suivront. La vaccination est un bien public mondial et il nous faudra être en mesure de développer, de fabriquer et de déployer des vaccins dans les plus brefs délais.
C’est pour cette raison que le Dispositif pour accélérer l’accès aux outils de lutte contre la COVID-19 (Accélérateur ACT) a été mis sur pied, son objectif étant de promouvoir l’égalité d’accès aux tests, aux traitements et aux vaccins et d’apporter un soutien aux systèmes de santé à l’échelle de la planète. L’Accélérateur ACT s’est montré, à bien des égards, à la hauteur des attentes, mais l’accès équitable n’est pas encore une réalité. Nous pouvons en faire davantage pour l’encourager à l’échelle mondiale.
Dans cette optique, nous croyons que les pays devraient œuvrer ensemble à l’élaboration d’un nouveau traité international sur la préparation et la riposte aux pandémies.
Un tel engagement collectif renouvelé serait une étape importante pour consolider la préparation aux pandémies au plus haut niveau politique. La Constitution de l’Organisation mondiale de la Santé lui servirait d’ancrage et il s’appuierait sur d’autres organisations sans lesquelles cette entreprise, menée à l’appui du principe de la santé pour tous, ne pourrait aboutir. Un tel traité se fonderait sur les actuels instruments mondiaux de la santé, en particulier le Règlement sanitaire international, de manière à lui garantir une assise solide et éprouvée qui nous servirait de point de départ pour améliorer les choses.
L’objectif principal de ce traité serait de promouvoir une démarche qui fasse intervenir l’ensemble des pouvoirs publics et de la société et qui renforce les capacités nationales, régionales et mondiales et la résilience face aux futures pandémies. Cela suppose notamment de consolider fortement la coopération internationale pour améliorer, par exemple, les systèmes d’alerte, la mise en commun des informations, la recherche, ainsi que la production et la distribution locales, régionales et mondiales de moyens médicaux et d’interventions de santé publique, comme les vaccins, les médicaments, les produits de diagnostic et les équipements de protection individuelle.
Ce traité ferait également sien le principe « Un monde, une santé » qui relie la santé des humains, des animaux et de notre planète. Enfin, un instrument de cet ordre devrait conduire à une plus grande responsabilisation mutuelle et à un partage des responsabilités, et favoriser la transparence et la coopération au sein du système international et à l’égard de ses règles et de ses normes.
Pour ce faire, nous travaillerons avec les chefs d’État et de gouvernement du monde entier et avec toutes les parties prenantes concernées, dont la société civile et le secteur privé. Nous avons la conviction que c’est à nous, en tant que dirigeants de nations et d’institutions internationales, qu’il incombe de veiller à ce que le monde tire les enseignements de la pandémie de COVID-19.
Au moment où la COVID-19 tire parti de nos faiblesses et de nos divisions, nous devons saisir cette occasion pour nous rassembler en tant que communauté mondiale en faveur d’une coopération pacifique qui aille au-delà de cette crise. Le renforcement de nos capacités et de nos systèmes pour y parvenir prendra du temps et exigera un engagement soutenu pendant de nombreuses années d’un point de vue politique, financier et de la société en générale.
Nous laisserons en héritage la solidarité qui sera la nôtre au moment de faire en sorte que le monde soit mieux préparé. C’est elle qui protégera nos enfants et nos petits-enfants et qui permettra que les futures pandémies affectent aussi peu que possible nos économies et nos sociétés.
La préparation aux pandémies a besoin d’un leadership mondial pour bâtir un système de santé mondial à la hauteur de ce millénaire. Pour que cet engagement devienne réalité, notre action doit être guidée par la solidarité, la justice, la transparence, l’inclusion et l’équité.
Signataires :
Par J. V. Bainimarama, Premier Ministre des Fidji ; Prayut Chan-o-cha, Premier Ministre de Thaïlande ; António Luís Santos da Costa, Premier Ministre du Portugal ; Mario Draghi, Premier Ministre de l’Italie, P Klaus Iohannis, Président de la Roumanie ; Boris Johnson, Premier Ministre du Royaume-Uni ; Paul Kagame, Président du Rwanda ; Uhuru Kenyatta, Président du Kenya ; Emmanuel Macron, Président de la France ; Angela Merkel, Chancelière de l’Allemagne ; Charles Michel, Président du Conseil européen ; Kyriakos Mitsotakis, Premier Ministre de la Grèce ; MoonJae-in, Président de la République de Corée ; Sebastián Piñera, Président du Chili ; Carlos Alvarado Quesada, Président du Costa Rica ; Edi Rama, Premier Ministre de l’Albanie ; Cyril Ramaphosa, Président de l’Afrique du Sud ; Keith Rowley, Premier Ministre de Trinité-et-Tobago ; Mark Rutte, Premier Ministre des Pays-Bas ; Kais Saied, Président de la Tunisie ; Macky Sall, Président du Sénégal ; Pedro Sánchez, Premier Ministre de l’Espagne ; Erna Solberg, Première Ministre de Norvège ; Aleksandar Vučić, Président de la Serbie ; Joko Widodo, Président de l’Indonésie ; Volodymyr Zelensky, Président de l’Ukraine ; Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, Directeur général de l’Organisation mondiale de la Santé.